15 Juil Immersion dans ma vie privée grâce aux métadonnées Gmail
Si vous avez suivi l’affaire Prism, vous êtes au courant de l’importance des métadonnées. Tout le monde craint que l’on puisse espionner les conversations que l’on tient par nos communications électroniques. Mais peu de gens savent que les métadonnées peuvent en apprendre beaucoup sur le profil d’un internaute. Les métadonnées (les données sur les données) regroupent pour Gmail par exemple qui envoie le mail, à qui, à quelle fréquence, avec quelle longueur, etc.
Pour démontrer que ces métadonnées en disent beaucoup sur vous, un groupe de chercheurs du MIT a mis au point une application web qui cartographie vos métadonnées Gmail. Il s’agit du programme Immersion.
Pris au jeu, et fervent utilisateur de Gmail depuis 2008, j’ai décidé d’analyser mes résultats. Et c’est assez bluffant. Suffisamment pour me faire prendre conscience d’un aspect de ma vie dont je n’avais qu’une vision floue : l’évolution de mes relations et réseaux dans le temps. Ou la chronique d’une isolation progressive. Une fois n’est pas coutûme, je vous propose de plonger avec moi dans ma vie, afin de vous démontrer à mon tour, que nos métadonnées sont très bavardes. J’ai bien sûr retiré les noms des contacts.
Juillet 2008 – Juillet 2009
Jeune étudiant de Sciences Po Lyon, je quitte la capitale des Gaules pour rejoindre Paris, entamer un master 2 de communication en alternance chez TBWA\CORPORATE. Jeune hôte de ce blog, grâce à ma meilleure amie Marion, je découvre aussi le monde des soirées blogueurs parisiennes, et mon travail d’apprenti chef de projet ePR m’amène à côtoyer certains blogueurs professionnellement. J’ai la chance d’avoir pas mal d’amis dans mon cas, montés sur Paris pour finir les études ou travailler, la plupart anciens de Sciences Po. Je découvre un excellent master, et la petite vingtaine d’étudiants que nous sommes devient un vrai groupe d’amis. Nous nous voyons en cours et en dehors, avec un grand esprit de corps qui n’a rien à envier à celui connu à l’IEP. Quelques amis se détachent de ce groupe, on se voit encore plus régulièrement. En parallèle, je quitte petit à petit mes activités politiques et associatives lyonnaises. Ma nouvelle vie sera parisienne !
Juillet 2009 – Juillet 2010
La vie parisienne prend forme ! Je découvre une vie sociale intense, au sein d’un groupe d’amis soudés, prêts à tous les 400 coups ! C’est l’époque de la Plurkie et de ses apéros sur le pont des Arts et à la Cordonnerie, ainsi que des débuts sous Twitter. Je suis officiellement embauché chez TBWA, j’étends mon réseau professionnel. Je vis une grande histoire d’amour à distance, je garde contact avec la famille par email. En partance de TBWA, j’hésite entre deux postes, je choisis Bercy. Une nouvelle année s’achève.
Juillet 2010 – Juillet 2011
J’ai de moins en moins de contacts avec les anciens du Master 2. Le groupe très uni s’est disloqué avec la folie parisienne et les premiers contrats professionnels. Je suis de plus en plus proche avec mon frère et ma soeur, avec l’âge. Je garde de bons contacts avec mes anciens collègues de TBWA (nous formons une belle étoile !).
C’est aussi l’époque de la naissance du Réseau des Jeunes Communicateurs Publics, que je co-fonde avec deux autres collègues de ministère. Ce réseau professionnel se développe à grande vitesse.
Telle une deuxième vie, j’entame aussi des fonctions dans une association événementielle, avec des gens totalement différents, déconnectés des autres.
J’ai moins de temps, le groupe des meilleurs amis est moins actif qu’avant, les échanges baissent. Je déménage dans le 15e arrondissement.
Juillet 2011 – Juillet 2012
Ma dernière année parisienne. Mes associations me prennent beaucoup de temps. J’y consacre beaucoup d’énergie. Je commence également à donner des cours à Sciences Po Lyon, avec mon meilleur ami qui a déménagé là-bas. Du groupe des meilleurs, je n’ai que quelques contacts avec ma meilleure amie et son dernier garçon. J’ai moins de contacts avec mes anciens collègues de TBWA. Et je ne parle pas des amis du Master. Je perds pied dans ma vie sociale. J’ai l’impression de ne plus avoir de socle fort. J’étouffe. Fin juillet 2012, je démissionne de Bercy. Je quitte Paris. Pour Lyon. Retour aux sources. Retour au calme.
Juillet 2012 – Juillet 2013
La période Lyonnaise. Nouvelle vie. Je garde contact avec Paris, notamment via le Réseau JCP, que je ne quitte pas, bien au contraire. Avec mon meilleur ami, nous reformons un petit groupe de potes, ça ne durera pas bien longtemps. Une sombre histoire idiote viendra isoler les membres. Je ne connais plus grand monde ici à part mon meilleur ami, à qui je ne peux pas demander tout son temps. Que dirais sa future femme 😉 Je tente bien de prendre contact avec des anciens du lycée, notamment à mon arrivée, et aussi avec mes anciens colocs. On aime se revoir. Mais c’est très occasionnel.
L’avantage d’être à Lyon, c’est que je me suis rapproché de ma famille. Les échanges en sont plus forts.
Je garde quelques contacts, au début, avec la personne qui a partagé ma vie à Paris et ses ami(e)s. Et puis plus rien. J’ai des contacts de-ci, de-là, mais rien de soutenu. D’une vie sociale forte et animée, je suis passé à un vaste monde sans lien :
Voilà l’eclatante vérité telle que les métadonnées peuvent l’illustrer. Implacablement, froidement. Ma vie est cartographiée, statistique. Pas le place au doute, ou à l’interprétation subjective. Les données ne mentent pas. Et je suis affiché au grand jour. J’ai trouvé ça légèrement effrayant.
Et vous, qu’en pensez-vous ?